Si votre cœur comprend le message de l' oiseau, si votre oreille s’émeut du murmure du ruisseau ... ou si vous vous laissez simplement guider par ce que vous nommez le" hasard" , bienvenue et bonne lecture.

jeudi 31 janvier 2013

Docteur. (27)

Je suis malade.
 Oiseau a pris son stéthoscope et chaussé des verres demi-lune improvisés d'années d'études.
-"Symptômes"? demande-t-il d'une voix qu'il décore théâtrale.
-"J'ai la nausée. J'ai vomi des fantômes. Je croyais pourtant les avoir bien digérés."
-"Vous mangez trop vite, je vous l'ai déjà dit. Était- ce désagréable?"
-"Non point. Bien au contraire. C'est là ce qui m'inquiète. Mais j'en ai conservé une vive douleur, au creux de la poitrine."
Oiseau me frôle le front de ses rémiges expertes et constate la fièvre.
-"Suivez-vous bien votre régime? Racines de passé promesse, assaisonnées de sel de songes, à commander chez Utopie ?"
-"Je m'y applique jour et nuit. 
-"Alors c'est que vous lisez trop. Et que vous ouvrez trop les yeux. Cela vous fait tourner la tête. Bouchez-vous donc mieux les oreilles, gardez vos paupières mi-closes.
Inutile de vous faire ordonnance, vous ne la respecterez pas." 




lundi 28 janvier 2013

Ma Forêt. (26)

Ma forêt était petite et vaste à la fois.
Une mine de graphite, au bois fossilisé, gaînée dans une branche. Cèdre, pin, châtaignier. Et qui semait ses graines sur des feuilles cousues. Qui ne craignaient l'automne ni la morte saison.
Ses bois poussaient en lignes. Espaces et pointillés. En gravure, en récits qui contaient méchants loups. Ou gentils chevaliers. Mais aussi le contraire.
Et je la parcourais en écoutant la mer...et la corne de brume qui ne servait qu'aux mâts d'une forêt qui n'est pas.
De taillis, de sentiers, de bois de cornouillers mais surtout d'une clairière. Celle ou passe la lumière. Qui reste bien cachée. Pour  abriter des fées, pour les faire danser. 
D'arbres à la serpe d'or, temples, piliers vivants, et dont montent les chants annonçant les saisons.
Ma forêt me chauffait les doigts, les soirs où j'avais froid. Et elle  promettait de nourrir de ses baies mon âme sauvageonne.
...Je ne l'ai pas retrouvée. 

dimanche 20 janvier 2013

L'Amande amère. (25)

Oiseau me tend un catalogue. Oiseau ne sait plus qu'inventer.
Il me demande de choisir parmi les pages au fond bleuté.

Et me glisse pour instrument comme un filet à papillons.

Pour capturer Deneb blanche, et m'envoler avec le cygne. Au cœur du triangle d'été. 
Ou pour saisir au pied d'Orion, Rigel la bleue. Pouvoir fouler la voie lactée et en chasser tous les délices.
Cueillir la Perle à la Couronne. Les feux de la Boîte à bijoux.
Ou m'accrocher à la monture du cavalier Alcor de l'Ourse, et chevaucher cheveux au vent pour suivre Mizar dans sa course.

Je pose le tout et je m'en vais.

 J'escalade la haute montagne.
- C'est l'edelweiss que tu voulais ? demande Oiseau surpris tandis que je m'éloigne. Pour atteindre enfin l'océan.

- Une étoile de mer ? Puisque sinon des neiges. 

Je plonge à mains nues dans l'eau trouble, je les ressors ensanglantées.
Et de brandir haut mon trophée.
Une pelote urticante
encore violette de son bain d'encre
au bar des calamars du coin. 
Ce que je veux c'est cette étoile, celle qui se cache en cet oursin. C'est la plus brillante du ciel. Je te demande de l'accrocher. A côté de l'étoile Polaire. 

Oiseau me laisse choir en gloussant. Il part tout en haussant les ailes et en ignorant, à mes cils,  ces inexplicables diamants.




  

  

vendredi 18 janvier 2013

Deux enfants au soleil. (24)

Brume du soir.
Encore un autrefois. Du temps de l'autre moi.
Du temps de l'insouciance.
Deux Marie qui marchaient. Et qui n'étaient que rires.
Rêves d'adolescentes sur des chemins tracés.

Tu n'étais point rebelle, et acceptais ta vie.

Au lycée, quand nous étudiions les poèmes de Verlaine, tu te demandais si les auteurs étaient conscients des litotes, des allitérations qu'ils posaient ça et là. S'ils le faisaient exprès. Ou si leurs mots venaient comme ça. Dans une grâce non recherchée.
Je disais "Je ne sais pas" en mâchouillant le bout de tes crayons, ce qui te faisait rire. Moi je perdais toujours les miens. Sur les îles qui peuplaient la marge de mes cahiers.

A l'âge où l'on veut plaire, nous écoutions, à la radio, chez ta grand-mère, les exploits de héros aux vertes armoiries, chevaliers dont la lance était un ballon rond.

Les buts des stéphanois ... Nous étions fort savantes en corners, penalty.  Nos matchs secrets à nous, c'était de voir laquelle aurait droit au timide sourire à l'entrée de la classe.

Tu t'es mariée bien jeune. Et moi de Stéphanie suis devenue marraine. Mais une fée souvent absente. Parce que le temps avait passé, qu'il avait transformé nos routes. Les complicités se sont mues en repas de famille.

Un jour, à cet âge ou l'on n'a pas encore un cheveux blanc, la pâleur a gagné le rose de tes joues. Doucement. Impitoyable avec toi malgré ton franc sourire. 

J'ai gardé une image. La dernière de toi. Bien avant que tu ne partes. Dans la métaphore de ton regard à la barrière de mon jardin. Tu ignorais encore mais tu savais déjà.

Souvent, depuis, quand tu viens comme une brume, tu as quelque chose à me dire. Quelque chose à me raconter. De la vie simple. De la vraie vie. 
Le temps ne gomme pas tout...

A Marie-France et pour Stéphanie...





lundi 14 janvier 2013

L'or des jardins. (23)

S'arrêter sur des détails que l'on n'avait pas remarqués:
 Pas toujours facile lorsque l' on est occupé ! A courir après le temps.
A brasser du vent de force rien qu'artifice. D' en attendre toujours futiles bénéfices.

Promenade salutaire. Juste pour respirer. Pour saisir le parfum d'un jardin embaumé. Se sentir anémone que Zéphyr redécouvre.

 Et crier sa soif au soleil...

- Cesse de jacasser, me dit Oiseau chardon ! Et cherche la rosée ! Pique ton attention ! 
- Je sais ou elle se pose ! Je vais bien la trouver ! Au cœur du parapluie de flammes capucines. Aux grappes papillons de ces mauves glycines.
Aux herbes de Saint-Jean, aux liserons en coupes, aux clochettes de mai, aux pleurs de l'ancolie.Je sais ou elle se cache, je sais, elle est ici !

 Mais là je cherche en vain. Ma Rose ne peut m'aider, elle n'est pas au jardin !

Ivre de certitude. Titubant de raison et forgée d'habitude, mon pied trop assuré aller fouler une herbe. Petite qui poussait, doucement, au soleil.

- Regarde! crie Oiseau! Regarde ce que tu fais! Elle te tend la main. Laisse toi  donc surprendre et  ne néglige pas celle qui pourrait t' apprendre. Sois moins sûre de toi, sois moins évaporée.

Rameau de Marjolaine dans ses paumes coupelles qui m'offre pour m'aider les larmes du soleil. Et puis pour m'abreuver. Pour étancher ma soif.  Des perles de rosée, valant tout l'or du monde.

merci...










mardi 8 janvier 2013

L'Encre de tes Yeux. (22)

Odeur de craie, odeur rentrée.
Un tableau noir et sa morale. Comme de l'encre à tatouer. En rondes bien orthographiées, boucles de pleins et déliées. 
 Et l'Histoire, écrite en cursives. Dans des châteaux tout bouillant d'huile. Ou la triste princesse file. En attendant son bien-aimé.
Des ponts-levis, des barricades, Vauban qui partage le pain. 
Les rois Louis, tristes aubades du combat de ceux qui ont faim.

Quelques bûchettes pour compter. En ce doux bois de peuplier.
Phalanges articulées ivoires. Leçon de choses en l'encrier.
 Conjugaison de percevoir ? Au subjonctif s'il vous plait!
Il me faut prendre la tangente pour en trouver la solution.
Je suis la somme de vos regards, l'inconnue est mon équation.